Emine AKKUS, juriste, le 05/05/2020.
L’indivision correspond à la situation où deux ou plusieurs personnes détiennent ensemble un même ou plusieurs biens. « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait sursis par jugement ou convention ».
Quelles sont les situations possibles ?
L’indivision peut être volontaire ou encore forcée. Les propriétaires peuvent d’un commun accord accéder à la propriété ensemble sous la forme de l’indivision.
L’indivision peut également être subie à l’occasion de l’ouverture d’une succession ou encore lors de la dissolution du régime matrimonial au moment d’un divorce ou d’une séparation de corps.
Enfin, l’indivision peut être choisie par les partenaires dans le cadre de leur convention du pacte civil de solidarité.
Quelles sont les formalités pour établir une convention d’indivision ?
La convention d’indivision n’est pas forcément obligatoire. Cette convention d’indivision permettrait de mettre en place des règles de fonctionnement dans le cadre de l’indivision.
Si les coindivisaires souhaitent demeurer dans l’indivision, ils peuvent établir une convention d’indivision. Cette convention doit être établie par un écrit comportant la désignation des biens indivis et l’indication des quotes-parts appartenant à chaque indivisaire.
SI l’indivision comporte des biens immobiliers, la convention doit être établie par un notaire.
Pour établir une convention, les parties doivent disposer de leur pleine capacité juridique ou du pouvoir de disposer des biens indivis.
Pour les personnes mineures, le représentant légal peut conclure seul cette convention. Toutefois, dès sa majorité, le mineur devenu majeur pourra y mettre fin, qu’elle qu’en soit la durée, dans l’année qui suit la majorité.
Quelle est la durée d’une convention d’indivision ?
La convention peut être conclue pour une durée déterminée ou indéterminée. Si elle est conclue pour une durée déterminée, elle ne peut être supérieure à cinq ans. Elle est renouvelable par une décision expresse des parties. Elle peut également être renouvelée par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. Dans ce cas-là, le partage ne peut intervenir avant le terme seulement s’il existe des justes motifs.
En cas de durée indéterminée, le partage peut être provoqué à tout moment pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.
Un gérant peut-il être nommé afin de gérer l’indivision ?
Pour gérer l’indivision, les coindivisaires peuvent nommer un ou plusieurs gérants, choisis ou non parmi eux. Le gérant a, avant tout, une mission de représentation des indivisaires soit pour les actes de la vie civile, soit en justice, tant en qualité de demandeur qu’en défendeur.
Le gérant administre l’indivision.
Quels sont les actes qui peuvent être accomplis par les indivisaires ?
Chaque indivisaire peut prendre les mesures nécessaires seul à la conservation des biens indivis, même s’il n’y a pas d’urgence. Dans ce contexte, il peut utiliser les fonds de l’indivision détenus par lui. A défaut de fonds, il peut obliger ses coindivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.
La majorité des deux tiers (2/3) des droits indivis est nécessaires pour :
Tous les indivisaires doivent être informés. A défaut, les décisions prises seront opposables à ces derniers.
L’unanimité des coindivisaires est nécessaire pour les actes les plus importants notamment tout acte qui ne ressort pas de l’exploitation normale des biens indivis ou encore pour effectuer tout acte de disposition (vente, donation, …).
Quels sont les droits des indivisaires sur les biens indivis ?
Chaque indivisaire dispose d’un droit d’usage sur les biens indivis conformément à leur destination. Cependant, à défaut d’accord entre les coindivisaires, l’exercice de ces droits est réglé par le président du tribunal.
Par ailleurs, si un seul des indivisaires use ou jouit privativement de la chose indivise, il sera redevable d’une indemnité, sauf convention contraire.
De plus, les fruits et revenus des biens indivis accroissent à l’indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise.
Chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis et supporte les pertes proportionnellement à ses droits dans l’indivision.
Tout indivisaire a la possibilité de demander sa part annuelle dans les bénéfices. Ces bénéfices seront déduits des dépenses entrainées par les actes auxquels il a consenti ou qui lui sont opposables. En cas de contestation, le président du tribunal judiciaire peut ordonner une répartition provisionnelle des bénéfices sous réserve d’un compte à établir lors de la liquidation définitive.
Lorsqu’un indivisaire gère un ou plusieurs biens indivis est redevable des produits de sa gestion. Dans ce cas-là, il a droit à la rémunération de son activité qui peut être fixée à l’amiable ou par décision de justice.
L’indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute.
Comment l’indivisaire peut-il céder sa quote-part ?
Dans le cadre de l’indivision, chaque indivisaire dispose d’un droit de préemption en cas de cession des parts. Lorsque l’indivisaire souhaite céder sa quote-part à titre onéreux à une personne étrangère de l’indivision, les autres coindivisaires disposent d’un droit de préemption. Ainsi, l’indivisaire cédant doit notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.
Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés. Cette déclaration de préemption est valable deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur. En effet, l’acte de vente doit être réalisé dans ce délai précité. Passé ce délai, la déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur.
Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision.
Lorsque des délais de paiement ont été consentis par le cédant, et que, par suite des circonstances économiques, la valeur des biens qui lui sont échus a augmenté ou diminué de plus du quart depuis le partage, les sommes restant dues augmentent ou diminuent dans la même proportion, sauf exclusion de cette variation par les parties.
Les indivisaires disposent également d’un droit de substitution. S’il y a lieu à l’adjudication de tout ou partie des droits d’un indivisaire dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens, l’avocat ou le notaire doit en informer les indivisaires par notification un mois avant la date prévue pour la vente. Chaque indivisaire peut se substituer à l’acquéreur dans un délai d’un mois à compter de l’adjudication, par déclaration au greffe ou auprès du notaire.
Quels sont les risques si le bien indivis est vendu sans respect du droit des indivisaires ?
Si le bien est vendu en violation du droit de préemption et de substitution des indivisaires, la cession opérée sera considérée comme nulle.
L’action en nullité se prescrit par cinq ans. Elle ne peut être exercée que par ceux à qui les notifications devaient être faites ou par leurs héritiers.
Quels sont les droits des créanciers ?
Les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu’il y ait eu l’indivision et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l’actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis.
Les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles. Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coindivisaires peuvent arrêter le cours de l’action en partage en acquittant l’obligation au nom et en l’acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis.
Quels sont les actes autorisés par le juge ?
SI l’un des indivisaires se trouve hors d’état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d’une manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge.
Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coindivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun. L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut.
De plus, le président du tribunal judiciaire peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun. Il peut, notamment, autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l’indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l’emploi. Cette autorisation n’entraine pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l’héritier.
Le président du tribunal peut également soit désigner un indivisaire comme administrateur en l’obligeant s’il y a lieu à donner caution, soit nommer un séquestre.
Par ailleurs, le président du tribunal peut aussi interdire le déplacement des meubles corporels sauf à spécifier ceux dont il attribue l’usage personne à l’un ou l’autre des ayants droit, à charge pour ceux-ci de donner caution s’il l’estime nécessaire.
Quelles sont les possibilités pour l’aliénation d’un bien en cas de désaccord entre les indivisaires ?
Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l’un des indivisaires est présumé absent, ou par suite d’éloignement, se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’aliénation d’un bien indivis peut être autorisée par le tribunal judiciaire, à la demande de l’un ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis.
Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l’alinéation du bien indivis. Dans le délai d’un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires. Si l’un ou plusieurs des indivisaires s’opposent à l’alinéation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.
Dans ce cas, le tribunal judiciaire peut autoriser l’alinéation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.
Une fois que les autorisations sont prises, l’alinéation s’effectue par licitation. Il s’agit donc d’une vente aux enchères. Les sommes retirées de l’alinéation ne peuvent faire l’objet d’un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l’indivision.
L’alinéation sera opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l’intention d’aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée par le notaire.
Comment l’indivision prend-elle fin ?
Ainsi, l’indivision peut prendre fin soit par la cession des parts dans l’indivisions, soit par le partage de tout ou partie des biens.
Liens utiles :
Du régime légal de l’indivision
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